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Journée mondiale de la justice sociale 2025 : les droits des travailleuses et travailleurs sont des droits humains

Actualités

La Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF) saisit l’occasion de la Journée mondiale de la justice sociale pour braquer les projecteurs sur des syndicalistes persécutés aux quatre coins du globe.

Les syndicalistes paient souvent très cher leur dévouement à la cause des droits et de la dignité de celles et ceux qui maintiennent notre monde en mouvement. Nous condamnons vigoureusement ces persécutions et appelons à la libération immédiate de nos camarades injustement retenus en détention ou en exil.

Stephen Cotton, Secrétaire général de l’ITF, déclare : « Attaquer un syndicaliste, c’est nous attaquer tous. Le mouvement syndical mondial est solidaire, aujourd’hui et chaque jour de l’année, des personnes dont le militantisme leur vaut les représailles de gouvernements autoritaires. Le pouvoir collectif des syndicats est le meilleur moyen de contrer tout ce qui divise la société. C’est là toute la signification de notre adage, ‘S’en prendre à l’un d’entre nous, c’est s’en prendre à nous tous’ ».

Constat accablant au niveau international

Les derniers chiffres de l’Indice CSI des droits dans le monde révèlent une triste réalité :

  • 87 % des pays violent le droit de grève.
  • 79 % des pays enfreignent le droit à la négociation collective.
  • 74 % des pays refusent ou font obstacle à l’enregistrement de syndicats.
  • 43% des pays restreignent la liberté d’expression et de réunion.

Les travailleuses et travailleurs des transports et leurs syndicats font souvent les frais de ces atteintes aux droits. La criminalisation, les représailles et les attaques ciblées contre les responsables syndicaux demeurent très répandues, partout dans le monde.

Détention abusive et exil de syndicalistes des transports

Carol Ng, Hong Kong

Carol Ng, ancienne présidente de feue la Confédération des syndicats de Hong Kong (HKCTU) et ardente militante de la défense des droits des travailleuses et travailleurs des transports et de l’aviation, est devenue l’incarnation des victimes de la répression en cours à Hong Kong. Carol était membre de la base du personnel de cabine de British Airways à Hong Kong, aujourd’hui fermée, et secrétaire générale de la British Airways Hong Kong International Cabin Crew Association (BAHKICCA), affiliée à l’ITF.

Le 19 novembre 2024, Carol a été condamnée à quatre ans et cinq mois d’emprisonnement au titre de la vaste loi sur la sécurité nationale, ayant été jugée coupable, comme des dizaines d’autres partisans de la démocratie, de « conspiration à des fins de subversion » pour avoir participé à des primaires démocratiques en 2020.

Le Hong Kong Labour Rights Monitor (HKLRM), groupe de défense des droits des travailleuses et travailleurs basé au Royaume-Uni, dénonce ces condamnations, les qualifiant de « répression des aspirations de démocratie des habitants de Hong Kong, les privant de manière flagrante de leurs droits civiques ». Selon le HKLRM, les inculpations et les peines, dont certaines de dix ans, sont contraires au droit international.

Christopher Mung, directeur exécutif du HKLRM, estime que la loi sur la sécurité nationale est « instrumentalisée par le gouvernement autoritaire » pour museler la société civile : « Il est maintenant critique que la communauté internationale fasse preuve de solidarité et exige la libération immédiate de ces personnes et des autres prisonniers politiques. Face au silence auquel sont réduits la plupart des syndicats, groupes de la société civile et partis politiques d’opposition, nous ne pouvons rester les bras croisés. »

Lors de sa comparution devant le tribunal, Carol Ng a affiché sa foi inébranlable en des moyens pacifiques et législatifs d’améliorer les choses pour les travailleuses et travailleurs de Hong Kong :

« Participer aux élections primaires, c’était un moyen de siéger au parlement, de permettre aux travailleuses et travailleurs de profiter des retombées du développement socio-économique et de protéger leurs droits, pas de subvertir l’État. »

Le courage de Carol Ng illustre bien la détermination des militants des syndicats des transports, malgré les risques. Sa mise en détention en dit long sur les dangers considérables auxquels s’exposent les personnes qui cherchent à défendre la négociation collective et les libertés syndicales dans un environnement répressif.

Sticks Nkambule, Eswatini

En Eswatini, pays cité par la CSI comme l’un des plus dangereux pour les travailleuses et travailleurs, les responsables syndicaux sont régulièrement harcelés, incarcérés ou contraints à la clandestinité. Sticks Nkambule, secrétaire général du Swaziland Transport, Communication and Allied Workers’ Union (SWATCAWU), recherché par ce régime adepte d’une répression brutale, est toujours en exil. Il a été victime d’une tentative d’assassinat il y a deux ans. Un triste anniversaire qui illustre bien les dangers auxquels s’exposent les syndicalistes en Eswatini.

Dans une récente déclaration à l’occasion de celui-ci, l’ITF a condamné cette « déplorable atteinte à la liberté d’association », exigeant l’abandon immédiat des charges sans fondement qui pèsent sur Nkambule.

Le Président de l’ITF, Paddy Crumlin, a déclaré : « L’exil auquel est contraint notre camarade Sticks à cause d’accusations aux motivations politiques et fabriquées de toutes pièces, constitue une déplorable atteinte à la liberté d’association et à la dignité de chaque travailleur... Nous dénonçons cette répression avec véhémence et exigeons réparation immédiate. »

Lors du 46e Congrès de l’ITF à Marrakech, les délégué(e)s ont adopté à l’unanimité la Résolution A08 engageant notre Fédération à faire preuve d’une solidarité inébranlable envers le SWATCAWU.

« Aussi répressif le régime soit-il, aussi long le combat soit-il, jamais l’ITF n’abandonnera ses camarades d’Eswatini », a conclu Paddy Crumlin. « Ensemble, nous ferons tomber les murs de la tyrannie, pour que chaque travailleuse et travailleur puisse vivre et travailler sans avoir peur, dans un Eswatini véritablement démocratique. »

Ebrahim Madadi et Davood Razavi

En Iran, le Syndicat de la régie des bus de Téhéran est depuis longtemps l’une des premières cibles de la répression. Ebrahim Madadi et Davood Razavi, deux grands noms de ce syndicat, aujourd’hui retraités, sont toujours incarcérés de façon abusive en raison de leur militantisme.

Ebrahim Madadi, ancien vice-président du Syndicat de la région des bus de Téhéran, avait de nouveau été arrêté le 11 août 2024. Ses ennuis judiciaires dataient déjà de plusieurs années, car il avait été incarcéré à plusieurs reprises pour avoir défendu les droits des travailleurs. Avant cela, il avait été condamné à une peine de trois ans et demi pour des accusations tout aussi infondées. Il avait également été inculpé pour avoir organisé une manifestation le 1er mai 2015, avec une peine d’emprisonnement initiale de cinq ans et trois mois, ensuite ramenée à un an par la Cour suprême. Les autorités refusent de le libérer, malgré ses graves problèmes de santé.

Davood Razavi, membre du comité exécutif du Syndicat, a été arrêté le 27 septembre 2022 pour son militantisme et pour avoir rencontré des représentants de syndicats français. Il a subi quatre mois d’isolement et des interrogatoires poussés.

À l’issue du procès, Razavi a été condamné à une peine de cinq ans de prison assortie d’une interdiction d’exercer des activités syndicales pendant deux ans. Son appel a été débouté. Il est actuellement détenu à la prison d’Evin et a récemment dû être hospitalisé pour problèmes de santé.

Ces cas illustrent la répression systémique qui règne en Iran. Le simple fait de rencontrer des collègues syndicalistes ou de tenter de marquer la Journée internationale des travailleurs est considéré comme une infraction pénale par les autorités. Ce climat répressif est régulièrement dénoncé par le syndicat.

Le droit aux activités syndicales : non négociable

Lors de son 46e Congrès à Marrakech en octobre dernier, l’ITF a réaffirmé que les droits du travail et les droits syndicaux sont des droits humains. Les offensives menées contre les droits du travail partout dans le monde, dont les principes et droits fondamentaux du travail, érodent la démocratie et attisent les divisions.

Aujourd’hui, en cette Journée mondiale de la justice sociale, nous apportons notre soutien à tous les syndicalistes persécutés. Nous réaffirmons notre engagement à dénoncer haut et fort les violations, et à agir et à défendre sans relâche les droits fondamentaux des travailleuses et travailleurs des transports partout dans le monde.

Nous appelons : 

  1. Les gouvernements du monde entier à exiger la fin des persécutions politiques et l’abrogation des lois draconiennes et punitives servant à persécuter les syndicalistes.
  2. Les organisations internationales à redoubler d’attention et à prendre des mesures fortes et sans équivoque sur le plan diplomatique, juridique ou autre pour protéger des syndicalistes comme Carol Ng, Sticks Nkambule, Ebrahim Madadi et Davood Razavi.

« Les droits des travailleuses et travailleurs sont les piliers de la justice sociale. Sans ces droits, il n’y a pas de démocratie », déclare Paddy Crumlin. « La solidarité du mouvement syndical mondial est notre plus grande défense contre les régimes totalitaires et, aujourd’hui, nous réaffirmons notre engagement de soutenir chaque syndicaliste persécuté. Nous continuerons le combat tant que ces syndicalistes n’auront pas toutes et tous recouvré la liberté. »

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