Les salariés de FedEx Australie sont en grève aujourd’hui [jeudi 30 septembre 2021], la direction refusant obstinément d’entendre leurs inquiétudes en matière de précarité d’emploi et de sécurité au travail.
Cette action fait partie d’une série de grèves tournantes de 24 heures décrétées dans plusieurs sociétés de logistique partout en Australie, convoquées par le TWU (Transport Workers Union), affilié à l’ITF. Les travailleurs protestent contre l’externalisation, qui s’inscrit dans une problématique plus large induite par les pratiques immorales des sociétés de distribution et de technologie qui dictent leur loi dans les chaînes du transport routier.
Ces grèves sont le reflet d’une agitation sociale partout dans le monde, les enseignes en ligne et d’autres grands clients appliquant des modèles d’entreprise intenables, souvent au détriment des conditions de travail et de la sécurité routière. Le TWU estime qu’un chauffeur-routier trouve la mort tous les 10 jours sur les routes australiennes.
« Nous soutenons nos camarades d’Australie », a déclaré Stephen Cotton, Secrétaire général de l’ITF. « Leur combat pour la sécurité d’emploi ne fait pas exception dans le secteur du transport routier. Les enseignes du commerce en ligne et les sociétés de logistique tentent de tirer les coûts vers le bas en externalisant et en utilisant des applications numériques. Mais ce faisant, elles créent une instabilité redoutable pour les travailleurs et leurs familles. Qui plus est, elles mettent la pression sur les chauffeurs-routiers pour qu’ils allongent leur temps de conduite au détriment de la sécurité, ce qui constitue un danger pour tous les usagers de la route. »
« L’ITF appelle les entreprises qui utilisent les transports routiers à prendre conscience des ravages qu’entraîne leur modèle commercial. »
Soutien massif à la grève
Les travailleuses et travailleurs ont voté à une majorité écrasante de 97 % en faveur de la grève chez FedEx, indique le TWU. Les négociations étaient dans l’impasse depuis la semaine dernière, quand la direction a refusé de garantir du travail au personnel existant avant de faire appel à de la main-d’œuvre extérieure. La société a également refusé de garantir les mêmes conditions de travail et de rémunération aux personnels externalisés.
Cette action fait suite à une grève de 2 000 travailleurs au sein de la société de logistique StarTrack la semaine dernière. Les membres du TWU de plusieurs autres entreprises, dont Toll, Linfox et Bevchain, ont également voté en faveur d’une action revendicative.
Avec l’essor du commerce en ligne, des sociétés de transport bien établies se voient contraintes d’externaliser et de revoir à la baisse les conditions de travail et de rémunération. Le modèle commercial de ces entreprises – et des applications de livraison à domicile comme Amazon Flex — sape les activités des enseignes traditionnelles en considérant les travailleuses et travailleurs comme des indépendants, en les rémunérant moins et en ne leur proposant aucune sécurité d’emploi. Elles se plaisent à vanter les mérites d’une plus grande flexibilité pour les travailleuses et travailleurs, mais des enquêtes menées par les affiliés de l’ITF (Australie, Inde) révèlent que les livreurs se sentent contraints de travailler plus vite, plus longtemps, et à des horaires plus contraignants. Autant de facteurs qui augmentent le risque d’accidents. Il est prouvé que ces nouveaux modèles d’entreprise sont dangereux.
« Il y a une réponse simple à ce nivellement par le bas », explique Noel Card, Secrétaire des Sections des transports internes de l’ITF. « Les gouvernements doivent collaborer avec les syndicats et d’autres parties prenantes pour instaurer des normes sûres en matière de conditions de travail et de rémunération. C’est ce que l’on appelle les ‘taux de rémunération garants de la sécurité’, dont l’efficacité est avérée. Si les conditions de travail et de rémunération sont réglementées de façon équitable, les sociétés n’auront plus à enfreindre les droits des travailleuses et travailleurs et pourront se livrer concurrence là où il convient, sur la qualité des services. »
« Avec des taux de rémunération garants de la sécurité, tout le monde y gagne. Le marché est moins volatil pour les sociétés de transport et leurs clients. Les travailleuses et travailleurs bénéficient de plus hauts salaires et d’une meilleure sécurité d’emploi, et il y a moins d’accidents de la route. »
Semaine d’action en faveur de taux de rémunération garants de la sécurité
L’ITF organise une Semaine d’action en faveur du travail décent et de la sécurité dans les transports routiers du 21 au 28 octobre. Celle-ci appellera les gouvernements à mettre en place des systèmes de taux de rémunération garants de la sécurité, et les clients et sociétés de transport à cesser leurs pratiques commerciales dangereuses et intenables. Durant toute cette semaine, les syndicats exprimeront leur solidarité aux affiliés de l’ITF menant des actions revendicatives dans des pays comme l’Australie et la Corée du Sud.
La Corée du Sud a adopté le système des taux de rémunération garants de la sécurité en 2020, lequel enregistre déjà des résultats probants. Cependant, de grandes sociétés de transport souhaitent son démantèlement.
« Ces entreprises semblent déterminées à risquer la vie des usagers de la route pour des économies de bouts de chandelle », déclare Coard. « Elles se refusent à voir les avantages à long terme de ce type de système. »
Les modèles d’entreprise dangereux et intenables sont la principale cause de la pénurie de chauffeurs-routiers dans le monde. Durant la Semaine d’action, l’ITF et ses affiliés promouvront les taux de rémunération garants de la sécurité comme seule option viable. Ce système a déjà été validé par les représentants des gouvernements, des syndicats et des employeurs à l’Organisation internationale du travail (OIT) par le biais des Principes directeurs sur la promotion du travail décent et de la sécurité routière dans le secteur des transports. Outre les taux de rémunération garants de la sécurité, ces principes directeurs tiennent les gouvernements, les sociétés de transport et les clients responsables d’un large éventail de normes applicables à tous les chauffeurs-routiers, indépendamment de la relation d’emploi, notamment :
- Droit à la liberté syndicale et à la négociation collective
- Protocoles de santé et de sécurité au travail, formation et prévention
- Transparence des contrats et des relations contractuelles
- Augmentation du nombre de femmes dans le secteur par une meilleure gestion de la chaîne d’approvisionnement pour permettre un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée, la prévention de la violence et du harcèlement, et des installations sanitaires adéquates
- Devoir de diligence en matière de droits de l’homme
- Contrôle et inspections
« En tant que syndicat représentant les travailleuses et travailleurs des transports au niveau international, nous adressons cet avertissement à la direction de FedEx en Australie et aux sociétés de logistique et autres qui sont ses clientes partout dans le monde », a indiqué Coard. « Le problème n’est pas local. Vous profitez des changements d’habitudes des clients et de la tendance à la livraison pour rendre la vie impossible aux travailleuses et travailleurs des transports et à leur famille. Les syndicats ne le toléreront pas. Le modèle que nous proposons constitue une solution juste pour les travailleurs et travailleurs, améliore la sécurité routière et crée un secteur des transports routiers plus durable pour nous tous. »